"La Vie Hospitalière"

jeudi 6 août 2020

24.500 morts de trop en France estimation finale Christian Perronne avait vu juste


On aurait pu avoir 83 % de morts en moins



ANALYSE : L’hydroxychloroquine marche épisode V : en Allemagne on dit “Wer heilt, hat recht” ou “Qui soigne a raison”. La stratégie de soins allemande appliquée en France aurait pu sauver 24500 Français atteints de Covid-19.

L’indice nrCFR(*) est une mesure de la qualité au fil du temps de la gestion médicale et des soins dans une population, appliquée ici à la pandémie Covid-19. L’article précédent (2) étudiait l’impact de la stratégie thérapeutique italienne appliquée à la France.  Dans cet article nous étudions l’impact de l’application de la stratégie de soins allemande à la France.

Deux pays voisins, deux stratégies opposées
L’Allemagne a adopté une stratégie de soins basée sur la totale liberté de prescrire pour les médecins traitants, dès le début et non pas au plus fort de l’épidémie comme en Italie.

Notamment le BfArM, Bundesinstitut für Arzneimittel und Medizinprodukte (équivalent de notre Agence Nationale de la Sécurité du Médicament), explique comment utiliser l’hydroxychloroquine au lieu de l’interdire :

Sa  fiche d’information sanitaire Covid-19 conseille sur l'utilisation hors AMM de l'hydroxychloroquine en donnant des informations détaillées pour les médecins traitants.  Ci-après leurs instructions pour le dosage en fonction des patients :

    Des doses quotidiennes de 400 à 600 mg sont principalement utilisées.
    Des doses de 5 mg / kg de poids corporel et 6,5 mg / kg de poids corporel, basées sur le poids idéal chez les patients en surpoids ont été utilisées.
    La dose quotidienne est généralement divisée en 1 à 2 doses. Pour une saturation plus rapide, certains protocoles de traitement prévoient des doses plus élevées le jour 1.
    La durée du traitement pour Covid-19 est rapportée différemment et varie de 5 à 10 jours

Pendant ce temps, la France prohibe par un décret du 23 mars 2020 la délivrance donc en pratique la prescription d’hydroxychloroquine en ville pour cette maladie. Et prohibera également le 9 juin l’azithromycine, fort utilisée en Allemagne.

Et si la France avait adopté la même stratégie que l’Allemagne ?

Certains lecteurs nous interrogent : “Les Allemands ne sont pas contents de la gestion de la crise dans leur pays (4).  Avec leurs quelque 9.000 morts. Que devrions-nous dire avec nos 30.000 ?  Si la France avait adopté la même stratégie de soins que l’Allemagne, combien aurions-nous évité de morts ? “

Tout d’abord nous avons observé que l’indice de létalité (indicateur du succès des soins) nrCFR allemand est resté bas en moyenne à 4,3% alors que l’indice français était à 23% en moyenne entre le 22 mars et le 10 juillet pour tendre vers 14,5%. Une différence très significative entre les deux pays.

Afin d’estimer le nombre de décès que nous aurions pu observer en France, nous avons donc appliqué la courbe de nrCFR de l’Allemagne à la courbe de cas résolus de la France.
L’hypothèse ici faite est que le gouvernement français aurait fait usage au fil du temps de la même stratégie de soins que l’Allemagne au lieu du “restez à la maison, Doliprane” français. Cela ne tient pas compte de l’hypothèse de saturation des hôpitaux.

Le graphique est éloquent.  L’aire bleue représente le nombre de décès en France observés sur la période du 22 mars au 10 juillet (en dehors de laquelle les données françaises ne sont pas exploitables) qui s’élève à 29.595 selon les données diffusées par Johns Hopkins University (JHU).  L’aire verte représente le nombre simulé de décès en France si elle avait eu la même courbe de nrCFR que l’Allemagne (3) : il ne s’élèverait qu’à 5080 dans cette hypothèse !




Une estimation confirmant celle du Pr Christian Perronne

La différence entre les deux courbes représente le nombre de Français qui auraient pu être sauvés si la France avait eu le même succès dans les soins que l’Allemagne. Cette seconde estimation de l’impact de la stratégie avec 83% de décès en moins en France sur la base de l’Allemagne, succède à celle de 28% effectuée avant-hier sur la base de l’Italie.

La stratégie allemande appliquée à la France aurait pu sauver 24.515 vies. Proche de l’estimation de 25.000 faite indépendamment par le Pr Perronne.

Cette estimation serait encore supérieure si l’indice était corrigé pour la différence d’âge des populations : 26% de personnes âgées de 60 ans et plus en France contre 28% en Allemagne. (données de la Banque mondiale pour 2018).

La citation d’Hippocrate “Qui soigne a raison” n’a pas été oubliée en Allemagne :  “wer heilt, hat recht”

(*) Définition : L'indice nrCFR (New Resolved Case Fatality Rate), mesure concrète et dynamique du succès des soins au fil du temps, quasiment en temps réel, a été créé par Michel Jullian. Il est simplement égal à la proportion de morts parmi les cas résolus (morts ou guéris) dans les 7 jours se terminant au jour J :

nrCFR(J) = [M(J)-M(J-7)]  /  [G(J)-G(J-7)+M(J)-M(J-7)]

où M=nombre total de morts et G=nombre total de guéris depuis le début de l’épidémie. L’indice doit être corrigé pour l’âge lorsque des populations de structures d’âge différentes sont comparées.

(2) Article du 3 août basé sur le nrCFR italien : Covid-19 : Au moins 8000 morts de trop en France en première estimation

(3) Somme sur la période de J=22 mars à J=10 juillet du nrCFR allemand au jour J appliqué au nombre de nouveaux cas résolus français du même jour lissé sur 7 jours.  De manière générale un lissage sur 7 jours a été utilisé pour compenser les effets des déclarations de données décalées dans le temps, par exemple effet weekend où les données sont publiées en début de semaine. 

(4) Autres éléments observés en Allemagne ne concernant pas directement les soins

En scientifique avisée, la Chancelière Merkel était la première à montrer l’exemple en se confinant.  L’Allemagne est sortie de la période de confinement dès qu’a été considéré franchi le pic épidémique.  En acceptant le risque de recrudescence des cas, devenue gérable par le fait que la capacité hospitalière était disponible.  Le dépistage massif en Allemagne a contribué à isoler rapidement les patients atteints et à risque, réduisant rapidement le R0 (indicateur de la propagation) en dessous de 1.

Malgré cette gestion de crise qui paraît exemplaire, certains médecins allemands se sont regroupés pour demander une commission d’enquête citoyenne : ils sont remontés contre la gestion politique et économique de la crise alors que l’Allemagne a un taux de létalité très bas.  Alors que l’AFP rapporte 17 000 manifestants ce samedi 1er août à Berlin, ce serait près d’un million d’Allemands qui auraient défilé en protestation contre la gestion de la crise en Allemagne.

Remerciements à Annie Wypychowski pour son aide à la rédaction-correction, à Nathalie Izzo (@Nathalienath19) pour son soutien, et à @Dover63A pour le “wer heilt, hat recht”

Article de Michel Jullian et Xavier Azalbert pour Franc Soir



Source : francesoir.fr
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