"La Vie Hospitalière"

mercredi 25 décembre 2019

Le cri de détresse des urgentistes du Kremlin-Bicêtre


À la veille des fêtes de fin d’année, le chef de service a alerté sa hiérarchie dans une lettre que nous nous sommes procurée. La direction de l’AP-HP confirme une situation «très tendue».
De source syndicale, voilà bien longtemps que les urgences de Bicêtre sont en maladie chronique. Mais cette fois, c’est un véritable signal de détresse que reçoit l’hôpital de l’Assistance publique (AP-HP).
Le chef de service des urgences a tiré la sonnette d’alarme juste avant les fêtes, au moyen d’un courrier adressé à la direction du CHU. Document que nous nous sommes procuré.
Alors que le manque d’effectifs se traduit par un «engorgement» des urgences, «que la grippe arrive» et « que les généralistes sont en vacances», la situation s’annonce d’après lui «extrêmement préoccupante».
Le jour où il a signé sa lettre, vendredi 20 décembre selon nos informations, le chef de service affirmait commencer sa journée avec un nombre de patients représentant « 10 heures de temps médical et soignant », « sans renfort de personnel et avec une aide-soignante en moins ».
«Un risque réel de contamination»
Mais son inquiétude va au-delà des « retards de prise en charge » et des « couloirs encombrés de patients » attendant « dans une promiscuité indigne ». « Un risque réel de contamination existe entre brancards qui se touchent », alerte-t-il, redoutant par ailleurs « une catastrophe en cas d’incendie du fait de l’entrave à la circulation » dans le service.
« À moins de tous démissionner (hypothèse sérieuse) », « nous n’avons d’autre choix que de subir », se désole le médecin au nom des « personnels déjà malmenés par les conditions de travail habituelles ». « Prévenez vos internes que les gardes vont être difficiles », demande-t-il à la direction du CHU tout en promettant, « comme d’habitude » et « au prix fort », de faire « le maximum » pour éviter les événements graves.
« L’an passé à Noël, les urgences étaient littéralement saturées, se souvient Olivier Bruley, délégué syndical FO et aide-soignant aux urgences. Cette lettre du chef de service, c’est un cri d’alarme préventif. »
La direction de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris confirme « un flux important de patients ces derniers jours, avec le début de l’épidémie hivernale ». Le service accueille « en moyenne 165 patients » par jour. Mais il y a bien eu « une pointe à 190 patients le vendredi 20 décembre ».
Congés, grèves et pannes de recrutement
Plusieurs facteurs entrent en compte : « Les congés de fin d’année », les grèves de transports qui compliquent « la gestion des plannings » et les « retours à domicile des patients », mais aussi les « difficultés de recrutement que connaît l’AP-HP depuis plusieurs mois ».
Le très récent dispositif « zéro brancard », testé à Bicêtre pour fluidifier les couloirs des urgences, a permis « d’améliorer significativement la situation » mais « elle reste très tendue », admet l’AP-HP.
Depuis le 18 décembre, Bicêtre expérimente en outre « la participation de médecins généralistes libéraux pour les soins non programmés ». Et « une cellule de régulation des capacités d’hospitalisation et d’appui aux urgences se réunit quotidiennement pour organiser au mieux l’aval des urgences ».
60.000 patients par an
Suffisant pour apaiser ce service aux 60.000 patients annuels, dont la fréquentation ne cesse de croître et qu’un titanesque chantier de modernisation devait révolutionner en 2013 et 2014 ?
« Ce qu’il faut, c’est recruter, martèle Isabelle Bernard, infirmière anesthésiste, secrétaire CGT et membre du Comité d’hygiène et de sécurité. Car tout est à l’avenant. »
« Samedi, poursuit-elle, une dame âgée s’est sauvée des urgences et personne n’a rien vu, l’unité de gériatrie aiguë est saturée, quinze lits sont fermés depuis des mois en pneumologie, la biberonnerie a failli fermer. Ces deux dernières semaines, on a rédigé quatre procédures pour danger grave et imminent. »


Source : leparisien.fr




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