"La Vie Hospitalière"

dimanche 29 mars 2020

À Marseille dans l'institut de Didier Raoult : "Les gens qui nous critiquent ne savent pas de quoi ils parlent"


À la tête d’un institut high-tech, l’iconoclaste professeur Didier Raoult pratique un dépistage en masse de patients positifs au coronavirus


Sur le parvis de l’institut hospitalo-universitaire (IHU) Méditerranée infection, le repaire de la nouvelle icône marseillaise Didier Raoult, la file des malades masqués s’est disciplinée. Les marins-pompiers veillent au respect du mètre de rigueur et régulent l’entrée dans le bâtiment. À l’intérieur, un même ordre règne : d’un côté, le groupe des tousseux et autres fiévreux est reçu par un professionnel de santé avant plusieurs examens ; de l’autre, les inquiets, peu ou pas atteints, introduisent eux-mêmes un bâtonnet dans leurs narines. Plus tard, le prélèvement est envoyé à l’"usine", laboratoire de biologie moléculaire où sont faits à la chaîne 2.500 tests chaque jour.

Au cœur d’une controverse sur l’efficacité d’un traitement précoce à base du vieil antipaludéen chloroquine, relancée vendredi par la publication de nouvelles données sur Internet, le professeur de microbiologie de 68 ans bouscule aussi un dogme français : il a mis en place un dépistage massif du Covid-19 quand les autorités sanitaires défendent toujours une lutte ciblée (malades, soignants, personnes fragiles). "On teste les gens, on les isole, décrit-il. Dans les maladies contagieuses, il faut trier. En vase clos, le risque est trop important. C’est pour ça que c’est la catastrophe dans certaines familles, comme dans les Ehpad."

Il a toujours vécu "au milieu des épidémies"


Ainsi fait qu’il questionne tout, et surtout l’autorité, Raoult défend la "quarantaine biologique" depuis deux mois. Fin janvier, quand les premiers rapatriés de Chine sont arrivés dans les Bouches-du-Rhône, il pestait déjà contre leur confinement en centre de vacances, proposant de les tester deux fois avant de "les laisser filer" si tout allait bien. "Pourquoi 14 jours? fulminait-il. Et pas 12 ou 17?" Pourquoi des tests pour tous à Marseille et pas (encore) ailleurs? Parce que l’IHU, centre d’excellence imaginé par le stratège Raoult, a été conçu pour faire face à une crise sanitaire d’ampleur.
"À Shanghai, j’ai réalisé que la Chine fonçait à une vitesse folle contre les maladies infectieuses. On ne pouvait pas rester avec ce niveau d’équipement ridicule"
"J’ai toujours vécu au milieu des épidémies, confie le natif du Sénégal, qui chasse encore le virus en Afrique. C’est ma vie." Dès le début des années 2000, ce fils de médecin militaire plaidait pour l’édification d’une ceinture Vauban de forteresses antiépidémies ; une seule a vu le jour en France, la sienne. "À Shanghai, j’ai réalisé que la Chine fonçait à une vitesse folle contre les maladies infectieuses, raconte ce compétiteur-né, qui énumère ses publications dans les revues scientifiques comme les champions leurs médailles au JO, et se compare à un Mbappé de la biologie. On ne pouvait pas rester avec ce niveau d’équipement ridicule."

Grâce à l’aide de fonds publics, un bâtiment de 27.000 mètres carrés abritant de nombreux chercheurs, civils et militaires ouvre ses portes fin 2016, à côté de l’hôpital de la Timone et de la faculté de médecine. L’architecture des 75 chambres d’hospitalisation a été pensée pour réduire le risque infectieux. "Il a compris qu’il fallait regrouper le dépistage, le soin, l’hospitalisation et la recherche, salue Renaud Muselier, président de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur, médecin et ami de longue date. Il a été visionnaire, ça fait sa force aujourd’hui."

Un chef charismatique qui aime tout contrôler

"Stoïcien", en bon lecteur de Sénèque, face aux critiques méthodologiques qui agitent la communauté médicale, Raoult confie avoir été fasciné, à partir de 1968, par l’université expérimentale de Vincennes. Quand il évoque cette "collection de types géniaux", ces Foucault, Deleuze, Baudrillard, "des anarchistes qui ne respectaient plus rien" et qui, dans leur coin, ont fabriqué "la pensée la plus puissante qui soit", l’autoportrait de groupe n’est pas très loin.

"On bosse ensemble depuis trente ans, on est une famille et un commando"

En chef charismatique aimant tout contrôler, du sourire des vigiles à la qualité des mémoires de master, Raoult s’est entouré d’une armée d’esprits vifs et fidèles. Ceux qui l’ont trouvé trop brutal sont partis, parfois fâchés ; lui a découragé "ceux qui ne pensent pas assez vite". "On bosse ensemble depuis trente ans, on est une famille et un commando", résume le professeur Philippe Parola, responsable du service des maladies infectieuses aiguës et colonel de réserve à la Légion étrangère.

Cet "enfant des quartiers nord" défend lui aussi une prise en charge made in Marseille, au nom du serment d’Hippocrate. Un cocktail d’hydroxychloroquine accompagné, en cas de pneumonie sévère, d’un antibiotique, mais pas seulement. "On fait le choix de dépister, de traiter si les gens le souhaitent et de les suivre en hôpital de jour, détaille le professeur Parola. Et, si besoin, d’hospitaliser de manière précoce les personnes malades et âgées au lieu de les laisser confinées à la maison en attendant que leur santé se dégrade."

"Que des exemples de désobéissance" dans sa famille

Que répond le chercheur chevronné à ceux qui pointent les faiblesses des récents travaux de l’IHU, et notamment l’absence de comparaison avec des patients non traités par la molécule ancienne? 
En substance : à la guerre comme à la guerre. "Je soigne les malades comme je soignerais mes propres parents en Corse, dit Philippe Parola. Ces médicaments sont connus depuis des années et leurs effets secondaires aussi. C’est la théorie du parachute : on donne ce qu’on pense le meilleur tout en surveillant différents paramètres, grâce à des électrocardiogrammes notamment."

Raoult évoque lui aussi l’image du "parachute". Et le patronage de de Gaulle refusant d’accepter l’armistice de Pétain. Le grand-père et la grand-mère maternels du médecin se sont engagés dans la Résistance. Son père a combattu "mitraillette à la main" au sein de la brigade Alsace-Lorraine de Malraux. "Dans ma famille, il n’y a que des exemples de désobéissance. La question, c’est : être digne de ceux qui nous ont précédés."

"Quand les gens tombent comme des mouches, ce n’est pas le moment de discuter méthodologie"

"Quand les gens tombent comme des mouches, ce n’est pas le moment de discuter méthodologie." Le professeur de microbiologie Bernard La Scola, qui règne, au sein de l’IHU, sur l’immense laboratoire de haute sécurité P3, balaie, lui aussi, la critique. Pourtant, il a d’abord douté en reprenant la piste de la chloroquine, défrichée par des chercheurs chinois. "Quand on met le coronavirus sur les cellules de culture, il se multiplie et les tue. Quand on ajoute les deux molécules, en revanche, les cellules sont en parfaite santé."

Si ses collègues cliniciens ne lui avaient pas assuré que, dans les étages voisins, les malades soumis à ce remède allaient mieux, il n’y aurait pas cru. "C’est dur d’extrapoler sur du vivant à partir de résultats in vitro. Mais là, ça semble cohérent." Aux yeux de La Scola, le débat sur la chloroquine pose une deuxième question de fond : "Le pays n’est pas armé pour faire du dépistage massif. Ici, on peut traiter parce qu’on a les moyens de dépister."

Raoult sait que les "théories ne durent qu’un temps". Lui et ses "colonels" envisagent-ils l’erreur comme un possible? Ces grands scientifiques ne se prennent-ils pas au piège du miracle dont ils rêvent? "Si rien ne peut vous convaincre que votre théorie est fausse, répond le directeur de l’IHU, c’est que c’est devenu une croyance." Douterait-il de la chloroquine?  
Pour lui, le débat n’est pas là. Didier Raoult le théoricien est aussi un clinicien. Il a décidé de tester en masse car il lui semblait impossible de renvoyer les gens chez eux sans les aider. "Peut-on laisser des patients en insuffisance respiratoire sans essayer un traitement qui marche en laboratoire?" Au bout d’un moment, il semble se rendre : "On sait tous qu’il est très difficile d’évaluer des médicaments dans des moments pareils." Et d’évoquer la magie de l’"effet placebo". Avant une nouvelle provocation : "Les gens qui nous critiquent ne savent pas de quoi ils parlent."

Article d'Anne-Laure Barret

Source : lejdd.fr
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