"La Vie Hospitalière"

dimanche 14 mars 2021

LETTRE OUVERTE . Vaccination des « soignants » contre la Covid-19 : Réponse à l’injonction diffusée par 7 Ordres professionnels de santé

À l’attention des 7 Ordres professionnels de santé suivants :

Ordre national des médecins ;

Ordre national des pharmaciens ;

Ordre national des chirurgiens-dentistes ;

Ordre national des sages-femmes ;

Ordre national des infirmiers ;

Ordre national des masseurs-kinésithérapeutes ;

Ordre national des pédicures-podologues.


 




Copie adressée à :


Monsieur le Président de la République, Emmanuel MACRON ;


Monsieur le Premier ministre, Jean CASTEX ;


Monsieur le Ministre des solidarités et de la santé, Olivier VÉRAN ;


L’Assemblée nationale ;


[au] Sénat ;


la haute autorité de santé (HAS) ;


l’agence nationale de sécurité du médicament (ANSM).



Dans le cadre de la vaccination contre la Covid-19, et de façon unanime, vous avez décidé d’adresser aux « soignants » ce qui pourrait être qualifié d’injonction.

Faisant suite à cette injonction, en date du 7 mars 2021, qui a été diffusée publiquement sous le titre « Les Ordres des professions de santé appellent l’ensemble des soignants à se faire vacciner », j’ai l’honneur de vous soumettre, dans ce qui suit, quelques observations qu’appelle, de ma part, votre initiative dont j’ai appris l’existence par voie de presse. La présente lettre ouverte ne présume pas du sens de ma décision personnelle (de se vacciner ou non).

Un tel communiqué au contenu autoritaire, diffusé publiquement par vos soins, pourrait laisser penser que des soignants seraient des "enfants capricieux", indisciplinés et irresponsables. Il livre les soignants au lynchage public notamment sur les réseaux sociaux. Il les stigmatise. Ces soignants ne font pourtant que s’interroger, de façon légitime, sur le rapport bénéfice/risque de ces vaccins contre la Covid-19. Ils s’interrogent d’abord pour l’intérêt des patients ; et ensuite pour leurs propres intérêts concernant leurs propres corps.

Ladite injonction appelle « d’une seule voix l’ensemble des soignants à se faire vacciner. A la fois parce que cela relève de leur devoir déontologique, protéger leurs patients en toutes circonstances, et parce que qu’il est impératif qu’ils puissent eux-mêmes se protéger contre le virus, ainsi que leurs proches, et freiner la propagation de l’épidémie ».

Vous affirmez que « le vaccin Astra Zeneca (…) est sûr et son efficacité est amplement démontrée (…) ». Vous ne semblez exprimer aucune nuance, aucun doute, aucune réserve, aucune prudence.

Le doute jaillit pourtant de notamment les propos, en date du 18 février 2021, du Ministre des solidarités et de la santé, lui-même ; des écritures du Ministère des solidarités et de la santé adressées (les 22, 25 et 26 février 2021) au juge administratif (le Conseil d’État) afin de justifier le maintien de l’enfermement des personnes âgées pourtant vaccinées ; des écritures de la haute autorité de santé (HAS), de celles de l’agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), de celles de Santé publique France, etc.

Pas plus tard que le 25 février 2021, et concernant notamment ce vaccin de la firme Astra Zeneca, la revue indépendante Prescrire rappelle l’absence « de nouvelles données décisives sur l’efficacité ». Elle soutient que « l’Agence suisse du médicament a fait savoir début février 2021 que : « les données soumises (…) sont encore insuffisantes pour permettre l’octroi d’une autorisation » pour » ce vaccin. Elle ajoute que « Fin février 2021, ce vaccin n’est pas autorisé aux États-Unis d’Amérique ».

Ces vaccins contre la Covid-19 ne bénéficient d’ailleurs que d’une autorisation de mise sur le marché (AMM) qualifiée de « conditionnelle ». Je n’ai pas besoin de vous expliquer ce que cela veut dire.

Si ce que vous affirmez est exact, il suffira alors à une personne de se vacciner pour qu’elle soit protégée. De plus, les mesures barrières, les masques (dont les masques chirurgicaux, FFP2)… sont une alternative puisque leur efficacité a été promue par les autorités sanitaires depuis plusieurs mois. Pourquoi alors vouloir obliger les soignants à se vacciner ?

Une telle communication sur ces vaccins, qui sont des médicaments, heurte plusieurs dispositions du Code de la santé publique notamment ; que vous connaissez parfaitement.

Par ailleurs, par « décision du 2 février 2018 relative aux bonnes pratiques de pharmacovigilance », et au visa des dispositions législatives et réglementaires, le directeur général de l’agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) est venu, dans un « document unique », rappeler le cadre légal appliqué à la pharmacovigilance en France. Ces « bonnes pratiques » sont intégrées au Code de la santé publique. Elles consacrent justement les règles d’une « communication » portant « sur la sécurité d’emploi des médicaments » et notamment ceci :

« La communication est un outil de gestion des risques essentiel pour atteindre les objectifs de la pharmacovigilance en termes de promotion du bon usage et de prévention des risques. Elle peut s’adresser aux professionnels de santé, aux patients et aux usagers du système de santé en général. » ;

« La communication sur la sécurité d’emploi de médicaments suit les principes énoncés (…), en particulier la communication : est claire et adaptée aux destinataires afin de répondre à leurs attentes ; est présentée de manière objective et non trompeuse ; présente toujours le risque en perspective du bénéfice attendu ; fait état des éventuelles incertitudes ; est précédée si possible de la consultation des patients et des professionnels de santé, particulièrement lorsque la situation est complexe ; est cohérente et coordonnée entre les différents acteurs concernés ; tient compte des exigences réglementaires en matière de protection des données individuelles et de confidentialité ; est suivie, si possible, d’une évaluation de son impact ; ne doit présenter aucun caractère promotionnel. ».

Toute personne a le droit à une information claire, loyale et appropriée avant de donner, éventuellement, son consentement libre et éclairé. Ce consentement est au rang des libertés fondamentales. Cette personne, en l’espèce le soignant, a le droit à une information sur notamment les risques fréquents ou graves même exceptionnels. Cela est consacré par le droit et par la jurisprudence.

La vaccination est un acte médical. La décision de se vacciner, ou non, relève du colloque singulier qui unit la personne à son médecin ; médecin traitant notamment. Les échanges enregistrés dans ce cadre sont protégés, de façon absolue, par le secret professionnel médical.

Il y a lieu de rappeler que même l’accord du patient ne libère pas le professionnel de santé de cette obligation de secret médical. Une telle obligation est-elle respectée eu égard aux chiffres livrés dans votre communiqué : « 40% des personnels des Ehpad et 30% des soignants en établissements hospitaliers et de ville » ? Quelles sont exactement les données, de nature médicale, qui ont été communiquées aux autorités administratives ?

Votre injonction contraste avec l’inertie de certains Ordres professionnels dans d’autres dossiers tels que celui relatif à la chronique insécurité médicamenteuse à l’origine de près de 20.000 décès par an et depuis plusieurs décennies ; et dont la moitié (en moyenne) est évitable. À titre accessoire, et pour information, je saisis cette occasion pour porter à votre connaissance (l’Ordre national des pharmaciens étant déjà informé) mon mémoire présenté, et soutenu publiquement, dans le cadre du Master 2 Droit de la Santé. Un diplôme délivré à la fois par la Faculté de droit de Rennes et par l’EHESP (école des hautes études en santé publique). Le titre de ce mémoire est :

Le circuit du médicament dans les établissements de santé 

français face aux articles 223-1 et 223-2 du code pénal

« Des risques causé à autrui »

Ce mémoire est accessible via le portail documentaire de l’EHESP.

Votre communiqué est d’autant plus choquant lorsque l’on se souvient de certains constats effectués par la Cour des comptes notamment.

En ce qui me concerne, j’ai choisi d’être et de rester pharmacien ; à ne pas confondre avec un "épicier de luxe" qui poursuit des intérêts personnels, catégoriels et corporatistes. Je n'ai pas décidé de faire ce métier, qui relève d’une profession réglementée, pour "jouer" au supplétif d’une politique de santé qui fait la promotion du « mésusage » de ces vaccins notamment ; et qui diffuse, publiquement, des informations en décalage avec les « données acquises de la science ».

Le pharmacien poursuit un but d’intérêt général. Son indépendance professionnelle n’est pas là pour assurer son confort, mais pour garantir la protection du public. Comme cela émane des écritures-mêmes de l’Ordre national des pharmaciens.

Votre communiqué ne semble pas mentionner vos éventuels liens ou conflits d’intérêts comme cela est exigé par le Code de la santé publique (article L.4113-13).

Être « soignant » ne fait pas de moi un « esclave » de l’Ordre professionnel ou de telle ou telle autre entité.

En pareilles circonstances, un « soignant » a également le droit de disposer, librement, de son corps.

Vous savez aussi pourquoi l’obligation vaccinale contre la grippe, de ces mêmes professionnels de santé, n’a pu prospérer. Et on dirait que, brusquement, ladite grippe aurait disparu…

Votre injonction soutient « qu’il est impératif qu’ils [lesdits soignants] puissent eux-mêmes se protéger contre le virus, ainsi que leurs proches ». Vous seriez donc aussi mieux placés pour nous dicter ce qui est bon pour notre santé ; et même pour celle de nos proches.

« Ton corps appartient à la nation, ton devoir est de veiller sur toi-même. » (Extrait des 10 commandements de la santé… des jeunesses Hitlériennes (1939). Cité par J. ATTALI, l’Ordre cannibale, 1979).

Il est conseillé de lire notamment l’article publié, le 30 août 2020, sous le titre « Covid-19 : une épidémie de « malades », ou une épidémie de « tests » et de « médias » ? ».

Enfin, je vous adresse, à nouveau, la lettre ouverte, en date du 5 mars 2021, qui a été envoyée notamment au Ministre des solidarités et de la santé, Monsieur Olivier VÉRAN sous le titre « Covid-19. Projet de vaccination « obligatoire » des soignants : lettre ouverte au Ministre des solidarités et de la santé ».

Les soignants ne sauraient constituer le bouc émissaire, d’une politique de santé défectueuse, que l’on voudrait sacrifier sur la place publique. D’autant plus que des soignants, qui souhaitent se vacciner, voient leurs demandes refusées eu égard notamment à la pénurie des vaccins constatée.

Par ces motifs, non exhaustifs que je me réserve le droit de parfaire, je considère donc que votre injonction est, pour le moins, injustifiée. Infondée. Elle est préjudiciable à l’image des professionnels de santé ; voire même surtout à l’image des sept institutions ordinales dont les représentants ont jugé utile d'élaborer et de diffuser, publiquement, ladite injonction.

Je vous prie de bien vouloir recevoir l’expression de mon profond respect.

Docteur Amine UMLIL

Pharmacien des hôpitaux, praticien hospitalier

Juriste (Droit de la santé)


Extrait du Curriculum vitae (C.V.)


 





Source : ctiapchcholet.blogspot.com

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