"La Vie Hospitalière"

jeudi 2 avril 2020

Saturation des hôpitaux, pic à venir, premiers effets du confinement... Un professeur du CHU de Clermont-Ferrand fait le point sur la situation


Avec un confinement décrété assez tôt, l’Auvergne pourrait éviter le pire si chacun respecte bien les règles et les gestes barrières. En tout cas, dans les hôpitaux, les services ont maintenu leur capacité d’accueil

Deux semaines. C’est le temps de latence estimé des symptômes du Covid-19. Logiquement, aussi, le temps d’attente pour voir les premiers effets du confinement. 


Accueil de 22 patients en provenance de Bourgogne-Franche-Comté
au CHU de Clermont-Ferrand samedi 28 mars.
( Photo © Francis Campagnoni )

Le temps pour nous de faire le point sur la situation en Auvergne.
La vague de malades a-t-elle déferlé sur la région ? 
Le pic est-il à venir ?
Le confinement porte-t-il ses fruits ?
Les réponses avec le professeur Olivier Lesens, praticien en maladies infectieuses au CHU de Clermont.

Des patients de Bourgogne-Franche-Comté ont été transférés à Clermont. Comment se passe leur accueil ?

Il y a 22 patients qui sont arrivés, le week-end dernier, au CHU de Clermont en provenance de l’est de la France. Cela a nécessité une grosse réorganisation. À Clermont, on a eu la chance d’avoir le temps de se préparer.
Nous avons dégagé de la place dans le service de traitement des personnes atteintes par le Covid et en réanimation. On a aujourd’hui énormément de lits en réanimation. C’était notre devoir d’accueillir ces patients et le personnel y a mis du sien.

Est-ce que cette prise en charge pourrait, à un moment donné, saturé les services ?

C’est notre devoir de répondre à l’appel à l’aide. Ça ne se discute pas. Dans la mesure où ça ne remet pas en cause la qualité de l’accueil des patients. Même si à Clermont-Ferrand, on n’a pas atteint le pic.

Justement, voit-on déjà les effets du confinement ?

C’est un peu tôt pour le dire. Je pense que, peut-être, on pourra mesurer cet effet à Clermont en fin de semaine. Chez nous, le confinement a été mis en place avant le gros de l’épidémie. Il faut donc continuer à respecter le confinement pour éviter le pire.
On a beaucoup entendu parler d’une vague de malades attendue. La vague approche ?

Nous avons largement de quoi hospitaliser les patients ou d’accueillir des malades en réanimation. Nous ne sommes pas encore au pic, mais il y a des évolutions au jour le jour. On suit cela de près. 

Concrètement, de combien de lits disposez-vous ?

« Il reste cinquante lits en réanimation dans toute l’Auvergne. Et nous pouvons très rapidement mettre cinquante lits supplémentaires en place. Dans le conventionnel, le nombre de lits est largement suffisant. Les gens commencent à guérir et sortir, donc, même aux maladies infectieuses, on commence à avoir à nouveau de la place, alors que le service était plein il n’y a pas longtemps. »

Vous arrivez à avoir une visibilité sur l’évolution ?

Il n’y a pas de prévisions et personne ne peut en faire. Ce n’est pas la même dynamique dans toutes les régions. Tout va dépendre de la capacité des gens à respecter le confinement. Le seul chiffre que nous suivons de près, c’est le nombre de personnes en réanimation.
On imagine qu’une fois le pic atteint et l’amélioration de la situation, il y aura encore un temps de latence pendant lequel il faudra rester vigilant. 

Ce sera la période la plus difficile à gérer. Il ne faut absolument pas que l’épidémie reprenne. Et il faut qu’un certain nombre de patients soient immunisés pour que l’épidémie ne reprenne pas.
La létalité du virus reste assez substantielle pour les personnes fragiles. Malheureusement, on ne peut pas grand-chose. 
À un moment donné, quasiment tout le monde aura rencontré le virus. Notre objectif, c’est d’être en capacité de pouvoir traiter tout le monde.
La situation met en exergue un manque de moyen souligné depuis longtemps par le personnel des établissements publics. 
Il n’y a pas très longtemps, les hôpitaux publics étaient en grève. Mais la situation révèle plutôt une capacité de résilience du personnel. Quelque part, nous avons tenu. Mais les questions se reposeront ensuite.

On imagine mal votre quotidien. Êtes-vous submergés ?

Non, mais c’est le cas dans l’Est et bientôt à Paris. Ici, ça va encore. 

Propos recueillis par Simon Antony

Source : lamontagne.fr
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