"La Vie Hospitalière"

dimanche 2 juin 2019

Antibiotiques : des risques méconnus


On connaît tous aujourd’hui le risque majeur lié à la consommation excessive d’antibiotiques : le développement croissant de « super bactéries » multirésistantes. 
Si celles-ci tuent d’ores et déjà plus de 700.000 personnes chaque année dans le monde, elles sont en passe de constituer « l’une des plus graves menaces pour la santé au XXI ème siècle » selon l’OMS. 
Comme l’illustrait récemment un très bon documentaire de la chaîne Arte (« Antibiotiques, la fin du miracle ? »), l’usage excessif ou inadapté d’antibiotiques en santé humaine, mais aussi animale, a fait qu’on pourrait peut-être atteindre l’ère post-antibiotique d’ici peu. 
Une chose est certaine : si nous ne modifions pas nos pratiques et ne promouvons pas d’alternatives rapidement, à l’instar de la phytoaromathérapie ou la phagothérapie, nous pourrions, comme au XIX ème siècle, périr d’une infection courante ou d’une petite blessure mal soignée. 
Comme si cette menace ne suffisait pas, on découvre peu à peu d’autres effets indésirables inattendus de l’usage d’antibiotiques. Bien entendu, comme avec d’autres médicaments, on observe une perturbation de la flore intestinale, avec à la clef, des risques de dysbiose et candidose, de maladies inflammatoires chroniques des intestins (y compris chez le bébé à naitre), ou d’allergies alimentaires
Plus inattendu : des études ont également montré une augmentation significative du risque de calculs rénaux associée à la prise de certains antibiotiques, et même de schizophrénie et troubles affectifs sévères
Un des derniers risques identifiés est d'ordre cardiaque. Une première alerte avait eu lieu l’année dernière avec une classe d’antibiotiques en particulier, les fluoroquinolones (Ciflox, notamment), qui augmenteraient la prévalence des anévrismes et dissections aortiques. Mais une récente étude de grande ampleur de l’université Tulane, à La Nouvelle-Orléans, met en évidence un problème plus large et inquiétant : les femmes qui avaient pris des antibiotiques plus de deux mois d’affilée sur une période de 8 ans étaient 32 % plus susceptibles de développer une maladie cardio-vasculaire. Quant aux risques à plus long terme, impossible de le déterminer à ce stade… 

Les antibiotiques augmentent le risque de maladies cardiaques
(Article de Jeanne Le Borgne)
Oui, décidément, il est largement temps de changer de modèle et de trouver de nouvelles réponses efficaces aux problèmes infectieux. 
Inflammations intestinales, maladies mentales, calculs rénaux… et maintenant, risque de maladies cardiaques. D’après une récente étude, la liste des effets indésirables liés à la prise d’antibiotiques ne cesse de s’allonger.
Des chercheurs de l’université Tulane, à La Nouvelle-Orléans (Louisiane), ont suivi 36.500 femmes sur une période d’environ huit ans. Au cours de cette étude, 1 056 participantes ont développé une maladie cardio-vasculaire. Leur particularité est d’avoir, proportionnellement aux autres participantes, consommé des antibiotiques pendant une longue période.
Les scientifiques estiment ainsi que les femmes exposées aux antibiotiques sur une période de plus de deux mois d'affilée ou plus sont 32 % plus susceptibles de développer une maladie cardio-vasculaire et ce, indépendamment des autres traitements qu’elles prennent déjà ou de leur mode de vie. L’âge est aussi un facteur déterminant : les plus de 60 ans sont les plus exposées, mais on observe également chez les femmes âgées de 40 à 59 ans ce risque accru : elles ont 28 % plus de probabilité de souffrir d’une maladie cardiaque à la suite d’une utilisation prolongée de ce médicament. Seules les jeunes femmes ne semblent pas être affectées significativement par cette consommation. Pour les effets à plus long terme, de nouvelles recherches seront nécessaires.
Conséquences de la prise d’antibiotiques
Selon les auteurs de l’étude, plusieurs mécanismes peuvent expliquer l’impact de ces médicaments sur la santé cardiaque  :
Le traitement pourrait allonger la durée de l’intervalle QT (durée électrique d’une contraction cardiaque), ce qui peut causer des troubles du rythme cardiaque, pouvant évoluer vers une fibrillation ventriculaire (contraction rapide, désorganisée et inefficace des ventricules).
La consommation sur une longue durée d’antibiotiques stimulerait la prolifération et l’activité des macrophages (cellules des globules blancs capables de phagocyter des particules étrangères), ce qui pourrait induire une accumulation de lipides dans les vaisseaux et, à terme, de l’athérosclérose (plaques d’athérome bouchant les artères).
Les antibiotiques interfèrent avec l’équilibre du microbiote, augmentant ainsi le risque d’infections virales et bactériennes – elles-mêmes susceptibles de jouer sur le nombre de plaquettes, créer de l’inflammation et susciter un risque de thrombose (caillot dans le sang).

Sources : 
eurheartj (étude en anglais)


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