"La Vie Hospitalière"

lundi 18 novembre 2019

Plan hôpital : la reprise de la dette à l'étude


En réponse à la mobilisation réussie des personnels hospitaliers, notamment le 14 novembre, le Premier ministre dévoilera ce mercredi un nouveau plan pour l'hôpital. Reprise de la dette (ou une partie) et mesures structurelles sont sur la table.
Comment faire revenir l’hôpital public dans son lit ? Alors qu’après une première démonstration de force réussie le 14 novembre, les personnels hospitaliers appellent de nouveau à la mobilisation le 30 novembre, l’exécutif a remis sur le métier un plan d’urgence (le troisième depuis juin) dans l’espoir de faire baisser la température sociale. «Nous devons investir et assumer d’investir plus fortement que nous avions envisagé de le faire», s’est engagé Emmanuel Macron en marge de son déplacement à Epinay (Essonne), précisant que le Premier ministre détaillerait mercredi «le montant, l’ampleur, les modalités techniques et le calendrier». Ce «plan d’urgence» sera «conséquent» et «s’engagera jusqu’à la fin du quinquennat», a-t-il ajouté. Reste à savoir sur quel levier compte jouer le gouvernement pour atteindre cet objectif.
Car en insistant sur la nécessaire relance de l’investissement dans l’hôpital, Emmanuel Macron réintègre dans la réflexion gouvernementale une piste initialement écartée : la reprise par l’Etat de tout ou partie d’une dette hospitalière, qui avoisine aujourd’hui 30 milliards d’euros.
Bruno Le Maire a changé son fusil d’épaule
Au ministère de l’Economie et des Finances, on confirme qu’une telle «option» n’était «pas envisagée» il y a encore une semaine. Preuve que le message présidentiel a été reçu cinq sur cinq, le ministre Bruno Le Maire a changé son fusil d’épaule, se déclarant dimanche «ouvert» à cette solution. Dans les directions financières des établissements de santé, on applaudit : «Toute mesure de reprise de dette, parce qu’elle conduira à diminuer le montant des emprunts à rembourser ou les intérêts de la dette, se traduirait mécaniquement par une capacité d’investissement supplémentaire : cela veut dire pouvoir mener à bien des projets de rénovation ou de construction.» 
Toutefois, l’importance des marges financières ainsi libérées dépendra du contour de la mesure : «S’agit-il d’une reprise de toute la dette passée, ou seulement de celle à venir ; la reprise serait-elle totale ou partielle ?» s’interroge-t-on de même source.
Quoi qu’il en soit, une telle mesure pourrait laisser les hospitaliers sur leur faim. À Bercy, on alerte : «Il ne faut pas croire que ce serait l’alpha et l’oméga de la crise de l’hôpital.» Un sentiment partagé au sein de l’AP-HP : «Agir sur la dette ne permet pas d’augmenter les rémunérations des personnels et donc d’améliorer l’attractivité des métiers.» En clair, de répondre à la principale revendication des hospitaliers…
Revalorisation… de 0,1%
Or, pas de coup de pouce possible sur les rémunérations sans revalorisation de l’Ondam (Objectif national des dépenses de santé). C’est d’ailleurs la faible croissance de l’Ondam (2,3%) inscrite dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2020 qui, début octobre, avait fait bondir les personnels hospitaliers : la dynamique naturelle des dépenses de santé en France étant supérieure à 4%, c’était là acter un nouveau serrage de vis budgétaire. Et l’hôpital était en première ligne : la progression de ses ressources budgétaires étant limitée à 2,1% en 2020.
Le bug n’a pas échappé à Matignon. Difficile néanmoins de modifier de fond en comble un PLFSS déjà entériné en première lecture par l’Assemblée nationale et en cours d’examen au Sénat… Du coup, l’exécutif voudrait s’en tenir à une revalorisation de seulement 0,1% de l’Ondam. Quitte à réserver à l’hôpital les 200 millions d’euros de crédits supplémentaires ainsi dégagés. De quoi financer des gestes immédiats, comme le remplacement de petits matériels du quotidien, ou des mécanismes d’intéressements collectifs. Mais c’est là prendre le risque de la déception : même réel, l’effort est très en deçà des attentes des manifestants (4 milliards d’euros).
Plusieurs mesures structurelles sur la table
Le gouvernement n’entend pas en rester là. Pour rassurer les hospitaliers sur leur sort, et tordre le cou aux rumeurs de démantèlement de l’hôpital public au profit du privé, il devrait mettre sur la table plusieurs mesures structurelles. Son idée ? Donner aux établissements de santé une visibilité sur leurs ressources jusqu’en 2022 (en garantissant par exemple des tarifs planchers sur les actes de soin). La gouvernance des établissements de santé pourrait elle aussi être revue, de sorte que les médecins soient plus étroitement associés aux prises de décisions. Last but not least, la tarification à l’activité, bête noire des hospitaliers qui voient dans cet outil de gestion la source de tous leurs maux, pourrait elle aussi être aménagée. De quoi diviser le mouvement à moindres frais.

Source : liberation.fr



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