"La Vie Hospitalière"

mercredi 26 octobre 2022

Bilan des mesures anti-Covid par le n°1 mondial de l’épidémiologie

Alors que revient le temps (nous dit-on) d’une n-ième vague de Covid-19,  un examen critique des mesures sanitaires n’a pas été fait et semble ne toujours pas figurer à l’ordre du jour dans nos pays.

Il serait pourtant essentiel que nos gouvernements comme les agences de santé nationales et internationales  effectuent un diligent travail d’évaluation en toute transparence








Trois ans bientôt après le début de cette crise sans précédent, on n’entend toujours guère qu’un sentiment d’autosatisfaction de la part de ceux qui ont imposé ces mesures ou s’y sont ralliés, comme vient de le montrer un nouveau vote au Conseil national de la Confédération helvétique.


Les parlementaires ont ainsi prolongé la loi Covid (et ses dispositions d’exception) au motif qu’il serait absurde « de se priver de la possibilité de réintroduire des mesures qui ont fait leur preuve ».


Mais ont-elles fait leurs preuves en réalité ?


Les organes et agences impliquées le répètent en boucle depuis les débuts de la crise : nous ne pouvions faire autrement, les mesures étaient nécessaires et efficaces. Point.


Le problème, comme l’a montré mon confrère et maître de conférences au CNRS Laurent Mucchielli, est que ce discours, cette narration, cette croyance, cette « doxa » dit-on en sociologie (terme décrivant un ensemble d’idées reçues et d’opinions tenues pour acquises) est fortement contredite par la réalité.


Pour lire et voir Pourquoi la doxa ne tient pas la route ! sur Covidhub.ch : cliquer ici.

  

John Ioannidis est l’épidémiologiste le plus renommé au monde. Professeur aux Département de médecine, Département d’épidémiologie et de santé des populations, Département des sciences des données biomédicales et Département des statistiques à l’Université de Stanford (Californie), il y co-dirige le Meta-Research Innovation Center at Stanford (METRICS). Le Pr Ioannidis est LA référence mondiale en matière d’évaluation de la qualité scientifique de la recherche, tout en étant un homme humble et délicieux.


Il a donné très vite au printemps 2020 des évaluations rassurantes (confirmées depuis) quant à la dangerosité du Covid . Il a également participé avec des collègues italien à une analyse très fine de la situation rencontrée à cette époque en Italie du Nord. Fin 2020, il avait montré dans une étude comparative entre 63 pays et territoires que les mesures de contrainte « sanitaires » n’apportaient pas de bénéfice probant.


Les toutes dernières évaluations qu’il vient de publier (en pré-print) montrent que la létalité avant vaccination du Covid  sur les tranches d’âge inférieures à 70 ans s’avère encore inférieure à ce qui avait été évalué.


Soit une létalité égale en réalité à celle de la grippe pour les adultes jusqu’à 69 ans et même inférieure pour les jeunes et les enfants !


Pour avoir avancé en avril 2020 (sur la base des données dont nous disposions alors) que la létalité du Covid-19 étaient « équivalente à celle d’une grippe moyenne à forte », j’avais essuyé des attaques virulentes. Deux ans et demi après, nous devons donc constater que c’était encore moins grave que cela !


Tout ça pour ça ?!









Pour lire Age-stratified infection fatality rate of COVID-19 in the non-elderly informed from pre-vaccination national seroprevalence studies sur medRxiv (en anglais) : cliquer ici.



De fait, la question que j’ai mise en lumière avec d’autres:


« comment a-ton transformé une épidémie gérable et bénigne en catastrophe  sanitaire ? »


est plus que jamais d’actualité.


C’est dire si l’article « Mesures agressives, inégalités croissantes et formation de masse pendant la crise du COVID-19 : vue d’ensemble et propositions pour l’avenir », écrit par le Pr John Ioannidis avec les Prs Michaéla Schippers (professeur au Département de la technologie et de la gestion des opérations, École de gestion & Université Erasmus de Rotterdam, Pays-Bas) et Ari Joffe (professeur à la Division de la médecine des soins intensifs, Département de pédiatrie, Stollery Children’s Hospital, ainsi qu’au Centre d’éthique de la santé John Dossetor, Université d’Alberta, Edmonton,  Canada),  paru le 25 août dernier dans la revue Frontiers in Public Health, est important.


Les auteurs adressent en effet sans faux-semblant mais avec doigté et nuances la question du bilan des mesures dites « sanitaires » contre le Covid19 (dites « interventions non-pharmaceutiques » – en sont exclus les traitements ainsi que l’injection génique appelée vaccin.)


Ce bilan porte donc sur toutes les autres mesures que nous avons connues : confinements et fermetures (entreprises, écoles, commerces « non-essentiels »), restrictions (couvre-feu, fermetures des bars et des restaurants), blocage des frontières, usage généralisé de tests PCR, systèmes et applications de traçage, imposition du port du masque, distanciation sociale, pass sanitaire, télétravail, etc.


S’ils soulignent avec prudence que des convictions existent chez certains scientifiques en faveur de l’utilité de ces mesures, les auteurs mettent le doigt sur trois points fondamentaux :


Les mesures concernées avaient été évaluées comme sans utilité probante dans tous les plans pandémie de référence.

Les méta-analyses les plus solides confirment cette absence d’effets utiles au cours de la crise Covid alors que les effets dommageables et même destructeurs, sanitaires et sociaux, sont massifs.

Les études aboutissant aux conclusions inverses ont un très faible degré de preuve.

Ils affirment dès lors qu’il faut impérativement mettre fin à ces mesures partout où elles sont encore en vigueur et éviter de les ré-imposer à l’avenir.


Pas tout à fait la conclusion heureuse des parlementaires suisses sur les « mesures qui ont fait leur preuves »…

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Nous avons été nombreux depuis bientôt trois ans à le dire, à le montrer, à le documenter. Certains faisaient partie des experts les plus compétents dans leur domaine (comme les Pr Perronne, Raoult, Bhattacharya, Kulldorf, Gupta, Mc Cullough, Risch, Malone, Kory, Toubiana, etc.), d’autres non (comme moi-même) mais avec toutefois une solide compétence en santé publique.


Tous autant que nous sommes, nous nous sommes fait écharper comme des malpropres sous le feu croisé des médecins de plateau, des journalistes devenus de purs communiquant au service de la doxa et des politiciens.


Il est donc tout sauf anodin que le n°1 mondial du domaine, avec deux co-auteurs éminents, se penche sur cette question : comment expliquer que tant de pays à l’unisson aient imposé des mesures nocives et largement inefficaces ?


La réponse tient à une somme de défaillances dans la gestion sanitaire de cette crise : la panique (indûment générée et entretenue) a polarisé les dirigeants et la population dans un phénomène de masse réprimant tout débat d’idées et suscitant une violence problématique envers les experts et les groupes désignés comme menaçant cette cohésion. Des phénomènes de manipulation psychologiques ont été employés, délibérément ou non – ceci pouvant aussi se produire comme résultante systémique de tels états collectifs.


Au lieu de préserver l’espace d’ un débat respectueux et ouvert, privilégiant l’esprit critique, les élites sont tombées dans le piège de désigner des ennemis avec les processus usuels en la matière de stigmatisation et de déshumanisation. La violence des mesures imposées à la population a alors trouvé un commode exutoire en se défoulant sur ces cibles désignées.


Ce glissement a mis en échec la qualité de l’expertise et de la décision publique, par défaut d’ouverture d’esprit (pensée de groupe), de diligence, de réflexivité et in fine d’intelligence collective.


Pour éviter de parler davantage du contenu de l’article, je reproduis ici son plan tel qu’il est détaillé dans l’introduction :


La présente revue (…) examine les conséquences des INP agressives sur l’augmentation des inégalités et leurs résultats négatifs pour l’humanité dans son ensemble. Nous décrivons comment ces INP ont un impact sur la formation des masses et le comportement des foules (Section Mesures agressives, formation des masses et comportement des foules), via des tactiques psychologiques telles que la manipulation et le contrôle des foules (Section Tactiques psychologiques).

La section Prise de décision centralisée et récit unique aborde le rôle de la prise de décision centralisée avec un récit unique et des contre-mouvements. La section Traumatisme collectif et conservation des ressources aborde les problèmes de traumatisme collectif et propose des perspectives issues de la théorie de la conservation des ressources.

La section Augmentation des inégalités offre une vue d’ensemble de l’augmentation des inégalités qui en résulte dans de multiples dimensions : socio-économique, sexuelle, sanitaire (mentale et physique) et éducative. La section Aurions-nous pu faire mieux ? examine si nous aurions pu faire mieux, et la section Discussion propose des pistes pour l’avenir. Nous terminons par une discussion et des recommandations sur les moyens d’atténuer les effets négatifs résultant des mesures agressives.



Rien n’est plus difficile que de se livrer à une évaluation honnête des conséquences de ses choix et de reconnaître ses éventuels erreurs ou torts. Les auteurs soulignent que cette  nécessaire mise à plat ne doit pas servir à blâmer ou à entrer dans des règlements de compte envers qui que ce soit, mais de comprendre ce qu’il s’est passé afin d’améliorer les processus de prise de décision et d’intelligence collective


J’invite les lectrices et lecteurs à se plonger dans ce texte remarquable. C’est de la très belle ouvrage, illustrant comment se construit une réflexion intelligente et nuancée en santé publique – à des années-lumière des slogans publicitaires assénés par certaines autorités ou une certaine presse.


Il s’agit certes d’un écrit quelque peu technique, mais agréable à lire et valant ô combien l’effort de lecture.


Je vous invite à le faire très largement circuler autour de vous. En n’hésitant pas à l’adresser à vos gouvernants, parlementaires, médecins, enseignants, journalistes et interlocuteurs.


Il est en effet vital à ce stade pour éviter la répétition du pire d’ouvrir (enfin !) un large débat de société et scientifique sur ce qui a été fait.


Le ton posé et respectueux de l’article est un formidable atout : seuls les plus fanatiques refuseront d’entrer en matière. Toutes les personnes de bonne volonté et de bonne foi, capables de se poser des questions au lieu d’insulter les autres, y trouveront à l’inverse une belle et utile matière à réflexion.


Je remercie pour terminer les auteurs (et principalement Michaéla Schippers, auteure référente) pour l’accueil chaleureux qu’elle a bien voulu réserver à ce projet de traduction, ainsi que Laurent Mucchielli pour son aimable relecture et pour son fantastique travail de décryptage de la doxa du Covid. Sans oublier mes collègues du Conseil scientifique indépendant, devant lesquels j’ai présenté le contenu de cet article lors de la séance du 15 septembre dernier. 


 "Les mesures de confinement : la plus grande erreur de santé publique de l’histoire ?!"

( CSI n° 71) : 





Pour télécharger la présentation au format pdf : cliquer ici.


Vous souhaitant bonne lecture, je forme mes vœux pour que le débat intelligent et apaisé tant attendu puisse enfin se dérouler et invite tous les concernés (autorités, parlementaires, presse, sociétés médicales, agences de santé, universités, collectifs citoyens, etc.) à s’y engager sans tarder.

Par Jean-Dominique Michel






Source : anthropo-logiques.org

Pour plus d'informations 








Pour consulter la seconde partie de cet article

Mesures agressives, inégalités croissantes et formation de masse pendant la crise du COVID-19 : vue d’ensemble et propositions pour l’avenir














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