Le déremboursement des tests pour les non-vaccinés constitue un point de rupture trop peu souligné, analysé et compris depuis qu'il est intervenu. Il rompt en effet avec l'héritage de 1945 et de la sécurité sociale universelle imaginé par ses fondateurs
Désormais, les cotisations sont obligatoires, mais les remboursements ne sont pas identiques à cotisation égale, selon que l'on applique ou non la politique gouvernementale.
Quand Véran dit que ne pas être vacciné doit avoir un prix
Le déremboursement des tests pour les non-vaccinés introduit une rupture majeure avec les idéaux de 1945 tels qu’ils furent formulés par leurs fondateurs et idéologues, comme Pierre Laroque. Les intéressés n’auraient jamais imaginé obliger les collaborateurs de Vichy à cotiser sans pouvoir bénéficier des mêmes prestations que les autres du fait de leurs choix politiques. Depuis le 15 octobre 2021, en France, le gouvernement a en revanche acté par simple arrêté ministériel que les non-vaccinés verraient leurs prestations de sécurité sociale diminuées par rapport aux vaccinés. Cette bascule mérite un commentaire relativement long, tant il introduit une “innovation” extrêmement discutable en termes politiques et sociaux.
Le déremboursement des tests pour les non-vaccinés, une sélection par l’argent
Il faut bien comprendre la logique du déremboursement des tests pour les non-vaccinés. Ces tests leur sont indispensables notamment pour avoir accès à l’hôpital pour des soins de suite ou des soins programmés. À partir du 15 octobre, les non-vaccinés doivent donc payer de leur poche pour pouvoir être soignés, par exemple des suites de leur cancer ou pour leur dialyse. Leur accès aux soins est devenu payant.
On ne manquera pas de s’étonner que les partisans habituels de l’accès aux soins et de la lutte contre le reste à charge n’aient aujourd’hui pas un mot de solidarité vis-à-vis des non-vaccinés qui subissent une discrimination fondamentale par l’argent. Tous ces bien-pensants pleurnichent beaucoup sur les pauvres allocataires de minima sociaux qui renoncent aux soins en temps ordinaires. Mais que ces mêmes allocataires refusent d’être vaccinés et là, la pleurniche se transforme au mieux en indifférence, au pire, en sarcasme.
Déremboursement et crédit social
Cette extravagante discrimination par l’argent a une explication simple, donnée par M. Touboul, conseiller d’Etat et directeur des affaires juridiques du ministère de la santé, lors de l’audience… au Conseil d’Etat (la justice administrative est un tout petit monde) sur l’arrêté ministériel instaurant le déremboursement. “Il faut bien qu’être non-vacciné ait un prix”, a-t-il déclaré publiquement.
Voilà le raisonnement de ceux qui se considèrent comme les représentants des Lumières face à l’obscurantisme anti-vaccinal : on attaque les opposants au portefeuille, en les obligeant à financer un système qui profite aux autres, et en les condamnant à payer pour avoir accès aux mêmes prestations que les autres.
Il ne s’agit ni plus ni moins que d’un crédit social à la chinoise où les “dociles” sont récompensés, et les “rebelles” pénalisés.
Une rupture avec l’idéal de 1945
Ce faisant, c’est bien le principe de l’universalité de la sécurité sociale qui est désormais remis en cause. Rappelons que la base de ce principe était que tous les assurés sociaux devaient ouvrir l’accès aux mêmes droits. Les puristes ajouteront que cette universalité est naturelle dès lors que l’héritage bismarckien de notre système implique que les droits sont directement liés à la contribution financière des assurés, qui est nominative et individuelle. C’était le principe même de la Charte du Conseil National de la Résistance (CNR), transcrite dans le préambule de la Constitution de 1946 :
11. Elle (la Nation) garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs.
Ce préambule a donné une valeur constitutionnelle à l’égal accès aux soins. Et il remet fortement en cause, et pour une double raison, le déremboursement des tests pour les non-vaccinés :
d’une part, exclure du remboursement les non-vaccinés ne garantit plus à tous la protection de la santé, en particulier si l’accès à l’hôpital est subordonné à la présentation de ces tests
d’autre part, décider par simple arrêté ministériel de toucher un principe constitutionnel illustre de façon flagrante (mais avions-nous encore besoin de cette illustration pour le savoir ?) la bascule du régime macronien dans une remise en cause autoritaire de l’Etat de droit.
C’est d’ailleurs en ce sens que l’excellente Diane Protat a plaidé au Conseil d’Etat, selon nos informations…
La question du monopole de la sécurité sociale est posée
Le déremboursement des non-vaccinés pose un problème d’équité qui risque de mettre le gouvernement en difficulté majeure. En effet, en rompant l’universalité de la sécurité sociale, il se cornérise lui-même en posant une alternative simple :
soit le Conseil d’Etat annule le déremboursement pour appliquer le préambule de la Constitution de 1946, qui fait partie de notre bloc de constitutionnalité. Le gouvernement subit alors une défaite politique majeure,
soit le Conseil d’Etat maintient l’arrêté de déremboursement, et il remet en cause le monopole de l’assurance-maladie. On imagine mal en effet des Français maintenus sans soins et sans assurance sociale couvrant le risque hospitalier. Chaque non-vacciné aurait alors la faculté de s’assurer auprès de l’organisme de son choix pour obtenir des remboursements que le système français lui interdit.
Organiser sa protection sociale quand on est non-vacciné
Dans la pratique, nous conseillons aux millions de non-vaccinés de prendre leurs dispositions pour assurer leur protection sociale effective et complète en contournant le monopole de l’assurance-maladie. De notre point de vue, la transformation de la sécurité sociale en outil de crédit social n’en est qu’à ses débuts. Il faut dès maintenant commencer à s’armer contre un système répressif qui exclura de ses prestations (mais pas de son financement) tous ceux qui désobéissent au gouvernement profond qui dirige ce pays.
Nous reviendrons sur cette question dans nos prochaines éditions.
Par Éric Verhaeghe
Source : lecourrierdesstrateges.fr
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