« La France ne doit plus être un de ces pays où les femmes ont peur », a déclaré le Président de la République Emmanuel Macron le 25 novembre, journée mondiale de lutte contre les violences faites aux femmes, où il a fait observer une minute de silence en hommage aux 123 femmes tuées en 2016 par leur partenaire ou ex-partenaire.
Faisant état du sentiment d'« horreur et de honte » qui s'est emparé de lui devant le déferlement des témoignages de femmes harcelées, le Président a décrété l'égalité entre femmes et hommes « grande cause du quinquennat », et a fixé trois priorités : le renforcement de l'arsenal répressif, un meilleur accompagnement des victimes et le développement de l'éducation et du combat culturel en faveur de l'égalité.
Une dizaine de structures pilotes pour la prise en charge
En 2016, 225 000 femmes ont été victimes de violences physiques ou sexuelles de la part de leur conjoint ; moins d'une sur cinq a déposé plainte.
Pour accompagner les victimes, des unités spécialisées dans la prise en charge globale psychotraumatique seront créées dans les centres hospitaliers dès 2018 ; une dizaine de structures pilotes sont prévues dans les mois qui viennent, en métropole.
Les soins psychotraumatiques liées aux violences subies pourront être pris en charge par la sécurité sociale. Les unités médico-judiciaire des hôpitaux pourront garder les preuves des violences, même si la victime ne souhaite pas porter plainte.
Emmanuel Macron a promis de « traquer partout ceux qui pratiquent l'excision, cette barbarie », et a appelé à porter « une attention toute particulière pour les femmes migrantes qui fuient leur pays, car elles cherchent aussi à fuir l'excision pour elles-mêmes et leurs petites filles ».
Délai de prescription, âge du consentement…
Le projet de loi contre « les violences sexuelles et sexistes » qui sera présenté en 2018 par Marlène Schiappa, secrétaire d'État à l'égalité entre les femmes et les hommes, et Nicole Belloubet, ministre de la Justice et garde des Sceaux, devrait comporter plusieurs mesures destinées à renforcer l'arsenal répressif.
Le délai de prescription des crimes sexuels sur les mineurs sera étendu à 30 ans, à compter la majorité de la victime, au lieu de 20 ans actuellement. La victime pourrait donc porter plainte jusqu'à l'âge de 48 ans, comme le préconisait la mission conduite par Flavie Flament et Jacques Calmettes - après une première loi doublant les délais pour les majeurs, jusqu'à 20 ans pour les crimes.
Le projet devrait aussi fixer un âge minimal du consentement, en dessous duquel le viol est automatiquement constitué de fait. Emmanuel Macron a plaidé pour l'établir à 15 ans - celui de la majorité sexuelle - « par conviction intime » et « par souci de cohérence et de protection des mineurs ». Le Haut conseil pour l'égalité entre les hommes et les femmes proposait 13 ans, eu égard aux législations espagnoles (12 ans), britanniques (13 ans), Belges (14 ans) ou Danemark (15 ans). La garde des Sceaux Nicole Belloubet qui s'était aussi prononcée pour un seuil à 13 ans, a indiqué qu'il y aurait un débat au Parlement.
La loi devrait créer un délit d'outrage sexiste punissant le harcèlement de rue, « verbalisable immédiatement pour un montant dissuasif ». « Une mesure qui porte une dimension symbolique puissante, et un aspect tout à fait réaliste », a commenté Nicole Belloubet.
Les victimes de violence, harcèlement ou discrimination pourront effectuer un signalement en ligne dès le début de l'année, et parler en direct avec des policiers ou gendarmes formés, quels que soient l'heure et le jour. Elles pourront aussi porter plainte dans les lieux de prise en charge, comme les hôpitaux.
Des associations inquiètes des moyens
Le CSA pourra intervenir sur les contenus numériques (internet, jeux vidéos, et plus seulement sur la télévision et la radio) pour lutter contre la pornographie accessible aux enfants, ou contre des contenus incitant à la violence contre les femmes. Des modifications législatives et une application pour les victimes sont attendues dès 2018 pour lutter contre le cyberharcellement ...
Les associations réclamaient un plan d'urgence. Si elles saluent l'engagement du président, elles regrettent l'insuffisance du budget interministériel de 420 millions d'euros, qui s'appuie sur l'existant, sans que des fonds supplémentaires ne soient débloqués. « Sans financement, tout plan de communication, de formation, de sensibilisation, de prise en charge des victimes sera vain » met en garde Osez le Féminisme, tandis que la militante Caroline De Haas appelle à prendre exemple sur l'Espagne et son plan d'un milliard sur cinq ans.
Extrait d'un article de Coline Garré
Lequotidiendumedecin.fr
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