A la demande du Comité
départemental de l’Ordre des masseurs-kinésithérapeutes de Haute-Savoie, un arrêt
de cassation partiel a été rendu le 18 novembre, il pourrait être de nature à
rendre obligatoire l’inscription des masseurs-kinésithérapeutes à l’ordre de la
profession.
...« Aux
motifs que l’article L. 4321-10 du code de la santé publique, issu de la loi du
9 août 2004, précise qu’un masseur-kinésithérapeute ne peut exercer sa
profession, à l’exception de ceux qui relèvent du service de santé des armées,
que : - si ses diplômes, certificats, titres ou autorisations ont été
enregistrés conformément au premier alinéa, -s’il est inscrit sur le tableau
tenu par l’ordre ; que l’article L. 4321-10 du code de la santé publique
précise ensuite « l’ordre national des masseurs-kinésithérapeutes a un droit
d’accès aux listes nominatives des masseurs-kinésithérapeutes employés par les
structures publiques et privées et peut en obtenir copie ; que ces listes
nominatives sont notamment utilisées pour procéder, dans des conditions fixées
par décret, à l’inscription automatique des masseurs kinésithérapeutes au
tableau tenu par l’ordre » avant d’ajouter plus loin : « les modalités
d’application du présent article sont fixées par décret » ; que l’article L.
4323-4 du code de la santé publique définit les peines susceptibles d’être
prononcées pour l’infraction d’exercice illégal de la profession de
masseur-kinésithérapeute ; qu’il existe donc déjà une difficulté concernant
l’appréciation par le juge de l’élément légal de l’infraction, puisque, sans
que cela ne soit clairement édicté par le législateur, il faudrait pour le juge
déduire de ces deux articles que l’exercice illégal de la profession de
masseur-kinésithérapeute serait constitué en cas de défaut d’enregistrement du
diplôme ou de défaut d’inscription sur le tableau tenu par l’ordre, ce qui ne
serait pas sans poser des difficultés quand on sait que les lois pénales sont
d’interprétation restrictive en raison des conséquences que peuvent avoir de
telles décisions sur la culpabilité et les conséquences susceptibles d’en
résulter sur la probité et l’honneur des personnes poursuivies ; que surtout
les prévenus présentent leur défense en indiquant refuser de s’inscrire à
l’Ordre, mais en soulignant que, conformément à l’article L. 4321-10 du code de
la santé publique, compte tenu de leur situation très particulière de
fonctionnaire travaillant au sein du centre hospitalier local, il est alors
parfaitement possible pour l’ordre, qui a accès aux listes nominatives des
masseurs-kinésithérapeutes employés par les structures publiques ou privées, et
donc à celle du centre hospitalier de Sallanches, de pouvoir procéder à
l’inscription automatique des masseurs-kinésithérapeutes au tableau tenu par
l’ordre, ceci devant toutefois intervenir « dans des conditions fixées par
décret », précisant qu’en l’espèce, cette inscription automatique n’a jamais pu
intervenir, puisque le décret susceptible de préciser les modalités de cette
inscription automatique n’a jamais été pris ; qu’il est donc constant que la
loi a prévu une possibilité pour le conseil de l’ordre de pouvoir
administrativement procéder à l’inscription automatique des
masseurs-kinésithérapeutes travaillant dans les structures publiques, comme
c’est le cas des deux prévenus ; qu’il s’avère cependant que cette inscription
automatique n’a pu se faire par manque de précisions sur les modalités
réglementaires à respecter, par suite de défaut de parution du décret ; que,
dès lors, il apparaît difficile de venir incriminer pénalement des praticiens
pour une infraction posant déjà problème au niveau légal de sa définition,
alors même que la situation serait régularisable sur un plan administratif et
que cela n’a pu être fait par manque de précisions sur les modalités à
envisager par suite du défaut d’intervention ; les prévenus seront donc relaxés
des faits poursuivis ; que sur l’action civile, la constitution de partie
civile de l’Ordre des masseurs kinésithérapeutes sera donc déclarée recevable,
mais les demandes présentées par ce dernier tant à titre de dommages et
intérêts qu’au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale, seront
rejetées par suite de la décision de relaxe intervenue … »...
Mais encore:
… « Attendu
qu’il résulte de ce texte que les masseurs-kinésithérapeutes, à l’exception de
ceux qui relèvent du service de santé des armées, ne peuvent exercer leur
profession que s’ils sont inscrits sur le tableau tenu par l’ordre ;
Attendu qu’il
résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure que Mme Julie X...,
épouse Y..., et M. Olivier Z..., masseurs-kinésithérapeutes au centre
hospitalier de Sallanches, ont été poursuivis pour exercice illégal de la
profession de masseurs-kinésithérapeutes, pour ne pas avoir sollicité leur
inscription au tableau départemental de l’ordre ;
Attendu que,
pour renvoyer les prévenus des fins de la poursuite et débouter la partie
civile de ses demandes, l’arrêt infirmatif attaqué relève qu’il n’est pas
clairement édicté par les articles L. 4321-10 et L. 4323-4 du code de la santé
publique que l’exercice illégal de la profession de masseur- kinésithérapeute
serait constitué en cas de défaut d’enregistrement du diplôme ou de défaut
d’inscription sur le tableau tenu par I’ordre ; que les juges ajoutent que le
législateur a prévu une possibilité pour le conseil de I’ordre de pouvoir
administrativement procéder à I’inscription automatique des masseurs
kinésithérapeutes travaillant dans des structures publiques, cette faculté
n’ayant pu être exercée en l’absence du décret d’application prévu par la loi ;
Mais attendu
qu’en se déterminant ainsi, alors que l’article L. 4323-4 du code de la santé
publique a pour objet de sanctionner pénalement le non-respect des conditions
d’exercice de la profession de masseur-kinésithérapeute définies en termes
clairs et précis par les articles L. 4321-1 et suivants du code de la santé
publique et en vertu desquelles, sauf exception, un masseur-kinésithérapeute ne
peut exercer sa profession que si ses diplômes, certificats, titres ou
autorisation ont été enregistrés et s’il est inscrit sur le tableau de l’ordre,
la cour d’appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus énoncé ;
D’où il suit que
la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE,
l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Chambéry, en date du 30 octobre 2013,
mais en ses seules dispositions civiles, toutes autres dispositions étant
expressément maintenues ;
Et pour qu’il
soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation
ainsi prononcée ;
RENVOIE la cause
et les parties devant la cour d’appel de Grenoble, à ce désignée par
délibération spéciale prise en chambre du conseil . »
Pour "La Vie Hospitalière" cet arrêt (partiel) de la Cour de Cassation pourrait faire tache d'huile et menacer notamment les IDE non inscrits à l'ONI actuellement.
(A Suivre)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire