"La Vie Hospitalière"

mercredi 16 décembre 2015

L'ASN pointe des failles importantes en radioprotection à l'hôpital de la Timone de l'AP-HM


L'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) considère qu'il existe un "réel manque d'appropriation de la culture de la radioprotection" au sein des blocs opératoires de l'hôpital de la Timone de l'Assistance publique-hôpitaux de Marseille (AP-HM). La direction générale signale que des mesures sont en cours pour pallier cette problématique.
Dans une lettre concernant l'inspection en radioprotection réalisée le 12 octobre dernier à l'hôpital de la Timone de l'Assistance publique-hôpitaux de Marseille (AP-HM), l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) indique que ses inspecteurs ont examiné par sondage les dispositions mises en place pour la formation et l'information des travailleurs. Ils ont étudié le classement du personnel, l'existence des personnes compétentes en radioprotection (PCR) et des personnes spécialisées en radiophysique médicale (PSRPM), le suivi des contrôles périodiques réglementaires et la démarche d'optimisation des doses pour la radioprotection des patients. Enfin, ils ont effectué une visite des blocs opératoires du bâtiment médio-technique (BMT), des installations récentes car réceptionnées au printemps 2013 et mises en service en novembre suivant (lire ci-contre). Ces mises en services coïncident à l'époque avec la mise en œuvre de mesures correctrices annoncées sur le tard par l'AP-HM pour réduire les rayonnements ionisants dans les canalisations la Timone, déjà pointés par l'ASN. Celle-ci attendait alors toujours du CHU phocéen un projet de modification profonde du service de médecine nucléaire.

La direction doit être "moteur" au sujet de la radioprotection

Lors de leur visite menée en octobre, les inspecteurs ont relevé la "forte implication" du service de radioprotection et de physique médicale (SRPM) et des professionnels collaborant avec cette équipe. "Les tâches qui leur sont attribuées sont accomplies avec rigueur, sérieux et dans la mesure du possible compte tenu des ressources insuffisantes au regard du parc d'installations", écrit l'ASN. Il convient de noter, selon elle, "que le travail fourni ne pourra bénéficier véritablement aux travailleurs qu'à la condition que le sujet de la radioprotection soit soutenu et porté en premier lieu par la direction de l'établissement, qui doit être le moteur principal sur ce sujet". En effet, l'autorité rappelle que les responsabilités au titre du Code de la santé publique et du Code du travail incombent respectivement au déclarant des installations et à l'employeur. "Au vu de cet examen non exhaustif, l'ASN considère qu'il existe un réel manque d'appropriation de la culture de la radioprotection" au sein des blocs opératoires de la Timone. "Le non-respect de points majeurs, piliers fondamentaux de la radioprotection des travailleurs et des patients", a été relevé par les inspecteurs. Plus particulièrement, cela concerne la formation à la radioprotection des travailleurs, le port de la dosimétrie passive et opérationnelle et des équipements de protection individuelle, détaille l'ASN. Elle appelle l'attention de la direction générale de l'AP-HM* sur le fait qu'il est de sa responsabilité, en tant qu'employeur, "de refuser l'accès aux zones réglementées aux travailleurs concernés lorsqu'ils ne respectent pas les règles essentielles de sécurité".

De "gros manquements" de la part des personnels médicaux

Concernant la radioprotection des patients, "aucune action n'a été menée sur ce sujet, les ressources actuelles en personne spécialisée en radiophysique médicale sur le domaine de la radiologie et le nombre de manipulateurs en électroradiologie médicale (Merm) ne permettant pas d'investir ce domaine", écrit l'autorité. Elle recommande de conduire une identification des actes les plus courants et les plus irradiants au sein des blocs. Sur le sujet de la formation à la radioprotection des patients et à l'utilisation technique des appareils, l'ASN note "de gros manquements de la part des personnels médicaux, d'autant plus dommageables du fait du nombre réduit de Merm au bloc opératoire". La formation à la radioprotection des patients constitue cependant un pré-requis pour effectuer des actes faisant intervenir des rayonnements ionisants, rappelle l'autorité. Enfin, elle perçoit "de manière défavorable la mise en service récente de blocs opératoires non conformes aux dispositions réglementaires en vigueur, sachant que la mise aux normes aura des répercussions organisationnelles, techniques et financières qui auraient pu être évitées". Aussi, une nouvelle inspection sera diligentée par l'ASN à moyen terme sur le sujet de l'imagerie interventionnelle au sein de l'AP-HM. Et de conclure : "L'état étayé des démarches engagées, et plus spécifiquement votre plan d'action en réponse aux demandes précitées, fera l'objet d'une attention particulière par la division de Marseille de l'ASN".

La direction de l'AP-HM signale des mesures pour pallier cette situation

Sollicitée par Hospimedia, la direction générale de l'AP-HM indique ce 3 décembre qu'elle prend acte de ces recommandations et qu'elle est en train de finaliser la réponse qu'elle doit adresser à l'ASN dans les deux mois à réception de la lettre. Elle indique dans un premier temps qu'un personnel de radioprotection qui était manquant a depuis été recruté. D'autre part, une campagne de sensibilisation et de formation des personnels médicaux est en train d'être planifiée en lien avec la commission médicale d'établissement (CME) de l'hôpital de la Timone, "sachant par ailleurs que les paramédicaux ont déjà été formés et sensibilisés". Concernant le plombage des salles, la direction générale indique que "vingt-huit salles sur quarante sont équipées à Timone 2" aujourd'hui. L'établissement a jusqu'au 1er janvier 2017 pour se mettre en conformité sur le plombage et la signalétique, souligne-t-elle, précisant que ceci est prévu dans le plan d'investissement et de travaux 2016, pour "toutes les salles de l'AP". "Nous sommes extrêmement sensibles à cette démarche d'amélioration continue, souligne la direction. C'est difficile car les normes évoluent ; la Timone 2 a ouvert en 2013 et à l'ouverture il était conforme.... C'est une course après les normes, parfois, mais nous nous mettons en règle". Enfin, autre réponse à une recommandation de l'ASN, le CHU est en train de recenser les besoins supplémentaires en équipements pour les personnels qui seraient nécessaires. La direction tient à signaler pour finir qu'aucun seuil d'alerte n'a jamais été atteint dans les blocs opératoires, depuis l'ouverture de Timone 2.

Article de Caroline Cordier 


Source  HOSPIMEDIA

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